La route 175, théâtre de nombreux accidents tragiques, traverse la réserve faunique des Laurentides sur 133 km et lie les régions de Québec et du Saguenay (figure 1). Cette route constitue le principal lien routier pour les quelque 300 000 résidants de la région du Saguenay vers la région de Québec et est essentielle au développement économique et touristique de la région. Globalement, le projet de 1,1 G$ vise à aménager la route d’une chaussée à deux voies contigües, à une route à quatre voies divisées par un terre-plein central sur près de 174 km (bornes kilométriques 53 à 227), afin de réduire les risques d’accidents frontaux. Des passages pour la grande faune de même que des clôtures ont également été mis en place afin d’améliorer le bilan routier. Le programme de surveillance présenté ici porte sur 143 de ces 174 km. La route 175 traverse un territoire très montagneux, dont l’altitude passe progressivement d’environ 200 m au km 66 à plus de 800 m au lac Jacques-Cartier (km 138) puis redescend à 160 m à la sortie du tronçon routier, au km 227, soit un dénivelé de plus de 600 m (figure 2). Les pentes des montagnes de part et d’autre de la route s’élèvent régulièrement à plus de 200 m par rapport à celle-ci. Il en découle des bassins versants qui réagissent très rapidement aux évènements météorologiques (pluie, fonte des neiges), entraînant ainsi un régime torrentiel. Ce secteur reçoit en effet en moyenne 600 cm de neige et 950 mm de pluie par année, ce qui est 1,5 à 2 fois plus que ce qui est observé à Québec. La saison sans gel ne dure d’ailleurs que 40 à 60 jours par année. Les sols sont généralement constitués de till sensible à l’érosion. Combiné avec les pentes transversales très fortes, cette situation amène un défi particulier quant au contrôle de l’érosion lors des travaux. La route croise plus de 300 cours d’eau d’importance variable. Au terme du projet, plusieurs structures (pont ou ponceau de plus de 4,5 m d’ouverture) seront réparées alors qu’une trentaine seront nouvellement construites. Environ 300 ponceaux permettront d’assurer le drainage de la nouvelle route. Le projet implique de déboiser quelque 860 ha, de manipuler plus de 17 millions de m3 (Mm3) de matériel de 2e classe, de dynamiter plus de 7 Mm3 de roc et de mettre en place 4 Mm3 de matériaux de fondation et 1 million de tonnes d’asphalte. À titre indicatif, tous ces matériaux rempliraient 16 fois le stade Olympique de Montréal. Quelque 140 aires de rebuts ont été créées afin de disposer des matériaux excavés impropres à la réutilisation. Certaines de celles-ci ont été aménagées sur d’anciens sites de matériaux d’emprunt entièrement exploités. Déjà surnommée en 1930, le paradis des pêcheurs, la réserve faunique des Laurentides est encore de nos jours un lieu de pratique d’activités récréotouristiques (chasse et pêche), de villégiature (nombreux chalets présents sur le territoire) et d’exploitation forestière. On y compte 850 plans d’eau, lesquels abritent des populations allopatriques d’ombles de fontaine, prisées par les pêcheurs (60 000 jours de pêche annuellement) et sources d’importantes retombées économiques pour le Québec, soit de l’ordre de 10 à 15 M$ par année. À titre d’exemple, la rivière Montmorency, incluant la Mare du Sault située le long de la route 175, fait l’objet d’une pêche intensive de l’ordre de 2 250 jours-pêche par année. Un des principaux défis était de réaliser les travaux en limitant les impacts sur la qualité de l’eau et les habitats de l’omble de fontaine, dans un milieu utilisé par les pêcheurs, chasseurs et villégiateurs, où les précipitations sont très abondantes, la topographie accidentée, les sols particulièrement sensibles à l’érosion, et où la saison optimale de construction est courte.